La messagerie instantanée existe depuis fort longtemps, depuis le précurseur IRC (Internet Relay Chat), assez rébarbatif et peu convivial il faut l’admettre, puis les bien connus ICQ et MSN et maintenant Skype ou Facebook, qui sont passés dans l’usage quotidien de tout utilisateur d’informatique à titre privé.
Il s’agit d’un excellent outil pour dialoguer avec ses connaissances, donc naturellement, pourquoi ne pas penser à des applications en entreprise ?
Les avantages sont multiples : peu importe que l’interlocuteur soit présent ou disponible, il lira et répondra plus tard. Peu importe que la discussion implique 2 ou 200 personnes, le fil est séquentiel et permet de tenir une réunion ou de diffuser un flux de nouvelles. Plus besoin de noter, c’est déjà fait.
La spontanéité de l’oral et la rigueur de l’écrit : que des avantages !!
Cependant, tout n’est pas si simple : de nombreuses interrogations et objections naissent de l’usage en entreprise et méritent d’être éclaircies
La sécurité
La messagerie instantanée peux s’appuyer sur un protocole propriétaire (Skype ou Slack) ou plus rarement sur le protocole normalisé par l’IETF : XMPP (Extensible Messaging and Presence Protocol).
Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit d’une combinaison d’échanges point à point et/ou de transfert par un serveur.
La première méthode a le défaut de révéler l’adresse IP du correspondant et de réduire la traçabilité générale des échanges, le second de faire transiter les données échangées par un tiers, pas forcément de confiance.
Donc, sauf à s’assurer que le serveur est bien interne et les échanges P2P inexistants, il y a bien un vrai problème de sécurité.
La valeur de l’écrit
Il n’y a pas à ma connaissance de jurisprudence sur les échanges par messagerie instantanée, comme il y en a maintenant sur les échanges mails, mais sur le fond, ils ont la même valeur de trace écrite.
La spontanéité en matière de messagerie instantanée ne serait donc pas de mise !
Cela va à l’encontre du concept même d’ « instantanéité » et c’est bien dommage.
Trouver le bon interlocuteur
La messagerie instantanée combine les conversations face à face et les chats de groupe.
Mais il est souvent complexe de décider d’entamer un échange vers un individu ou vers un groupe. D’un coté, on peut se tromper d’interlocuteur et lancer un échange qui n’aura pas de solution, d’un autre côté, on peut solliciter un ensemble de personnes alors qu’une seule est concernée et à même de fournir la réponse.
Le rapport de force
Dans les échanges intra-entreprise, il y a souvent un rapport solliciteur / sollicité : imaginez-vous ouvrir votre messagerie et voir des dizaines de fenêtres s’ouvrir avec tous les messages « urgents » de vos correspondants.
Pire, une amie, assistante de 400 consultants, m’a rapporté une anecdote : ses correspondants commencent souvent une conversation, fort civilement certes, par : « Comment vas-tu ? » Quel moyen alors pour elle de juger de l’importance et de l’urgence de la demande qui va forcément suivre, et décider si elle doit répondre ou ignorer la sollicitation ? Au final, elle ne lance plus la messagerie instantanée…
» La langue est la meilleure et la pire des choses » (Esope)
La messagerie instantanée reste avant tout un mode de communication oral. Elle se substitue efficacement à la messagerie traditionnelle dans bien des cas mais pour en faire un succès en entreprise, il faudrait repenser le formalisme du dialogue pour rassurer ses utilisateurs. Actuellement on peut imaginer l’utiliser au sein d’une petite équipe mais c’est loin d’être le cas à l’échelle de l’entreprise.
Olivier Piochaud, Président Directeur Général d’Apsynet